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La méthanisation agricole gagne du terrain

Sur les 1 450 méthaniseurs français en fonctionnement en 2023, 1 238 sont des installations à la fermes ou centralisées.

Avec plus de 1 450 unités en France, la méthanisation connaît une forte croissance ces dernières années. Valorisant de la biomasse essentiellement agricole, elle permet la production d’énergie renouvelable sur et pour le territoire.

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En janvier 2023, plus de 1 450 unités de méthanisation étaient en fonctionnement en France, selon une étude de l’Agence de la transition écologique (Ademe) publiée en octobre 2023. Parmi ces méthaniseurs, 1 238 sont détenus par des agriculteurs, sur leur exploitation ou via des unités centralisées communes à des agriculteurs, collectivités et/ou entreprises.

Le secteur agricole a donc un poids non négligeable dans la filière et connaît actuellement la plus forte dynamique de croissance avec environ 100 à 150 nouvelles unités mises en service chaque année. De plus, 90 % du gisement de biomasse méthanisable est d’origine agricole, principalement des effluents d’élevage, résidus de cultures, déchets agroalimentaires ou cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE).

L’injection met les gaz

La valorisation du biogaz produite par la méthanisation a évolué ces dernières années. Longtemps majoritaire, la cogénération d’électricité a peu à peu laissé la place à l’injection de biométhane dans les réseaux gaziers. Selon les dernières données de l’Ademe, la cogénération produit 2,5 TWh/an d’électricité (0,3 % de la production nationale), contre 9 TWh de biométhane injecté annuellement (2,5 % de la consommation nationale de gaz) et dont 1 TWh est valorisé comme carburant bio-GNV.

La dynamique de l’injection est donc forte. En 2022, neuf projets mis en service sur dix valorisent du biogaz par l’injection de biométhane dans le réseau, en raison notamment d’un meilleur rendement énergétique, avec 80 % de l’énergie primaire valorisée (de 40 à 55 % pour la cogénération).

Jusqu’à 130 TWh de biogaz en 2050

La guerre en Ukraine a rebattu les cartes de notre mix énergétique. Elle a renforcé l’urgence d’accélérer l’autonomie énergétique du pays, notamment en gaz. Or, la France figure parmi les pays qui possèdent les ressources méthanisables les plus importantes en Europe.

Les scénarios de l’Ademe sur l’atteinte de la neutralité carbone estiment qu’à l’horizon de 2050, les gaz renouvelables pourraient représenter entre 90 et 130 TWh/an d’énergie. À la condition de respecter « une politique soutenue de sobriété énergétique permettant de diviser par deux la consommation de gaz par rapport à la consommation actuelle », souligne l’Agence. In fine, le biogaz pourrait atteindre 82 à 88 % de la consommation de gaz en France en 2050.

À côté de la méthanisation déjà disponible sur le territoire, les procédés de méthanisation, pyrogazéification ou de gazéification hydrothermale, dites de « power-to-gas », sont amenés à prendre une place grandissante dans le mix énergétique renouvelable à partir de 2030. Il en est de même pour l’usage du carburant bio-GNV qui pourrait croître fortement dans les secteurs du transport routier lourd ou du machinisme agricole.

Des émissions de gaz à effet de serre évitées

D’origine « biogénique », le biométhane produit par la méthanisation est issu de produits végétaux ou animaux, à l’inverse du « gaz naturel » qui est, lui, d’origine fossile. Grâce à cette distinction, il est facile de comprendre le service environnemental rendu par le biométhane.

« Sur l’ensemble de son cycle de vie, et en prenant en compte l’énergie nécessaire à sa propre fabrication (engins agricoles…), le biométhane est 5 à 10 fois moins émetteur que le gaz naturel avec un facteur d’émission de 23,4 à 44 g CO2eq/kWh pour le biométhane contre 244 g CO2eq/kWh pour le gaz naturel », explique l’Ademe.

Depuis 2010, l’agence diffuse d’ailleurs un outil de calcul du bilan gaz à effet de serre (GES) d’une unité de méthanisation, appelé DIGES. Il permet d’estimer les émissions liées aux intrants, au fonctionnement du méthaniseur et à l’épandage du digestat tout en évaluant les tonnes de CO2 évitées par rapport au gaz naturel fossile. Résultat, le bilan net GES est nettement positif en termes de réduction des émissions, avec entre – 1 500 et – 2 500 t eqCO2/an pour une unité de méthanisation en injection de taille moyenne.

90 €/MWh de biométhane produit

Selon les études, le coût de revient du biométhane se situe aujourd’hui aux alentours de 90 €/MWh. Il est bien sûr variable en fonction de la taille du projet et du type de matières valorisées. Avant le conflit russo-ukrainien, ce coût était près de quatre fois supérieur à celui du gaz fossile (25 €/MWh), nécessitant un soutien public conséquent pour sa production. Les prix du gaz fossile ont depuis fortement augmenté et parfois même dépassé le prix de revient de biométhane.

Si les installations de méthanisation bénéficient de soutiens publics, via essentiellement un tarif d’achat garanti de leur production, les projets souffrent des aléas liés au marché de l’électricité pour leur fonctionnement, lui-même dépendant du contexte international. Face à la hausse des coûts des matériaux et de l’électricité, le gouvernement a pris des mesures en juin 2023 pour adapter au mieux les conditions de soutien pour les installations en fonctionnement ainsi qu’en projets (ajustement des tarifs d’achat du biométhane et révision des aides à l’investissement). « Ces mesures devraient pouvoir sécuriser les installations en fonctionnement et remettre en confiance de nouveaux projets face à la crise actuelle », indique l’Ademe.

Des besoins en foncier conséquents

En moyenne, le besoin total en foncier d’une unité de méthanisation est compris entre un et deux hectares, dont seule une partie est artificialisée. Dans le cas d’une microméthanisation à la ferme, attenante aux bâtiments d’élevage, l’emprise au sol peut descendre à moins de 0,5 hectare. La plus grosse part de cette emprise au sol (40 % environ) concerne les structures nécessaires au stockage des matières premières, notamment végétales.

Toujours selon les scénarios de l’Ademe à l’horizon de 2050, avec un parc de 6 000 méthaniseurs implantés en France, la surface artificialisée atteindrait près de 15 000 ha si on intègre la voirie des chemins d’accès. Si l’implantation des unités est possible en zone agricole, elle doit se faire à la double condition que le portage reste agricole et que la majorité des intrants soit d’origine agricole. Sans quoi, l’implantation ne peut se faire que dans des zones d’activité définies dans le cadre du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI).

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